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Saumon, avocat, bœuf : ces restaurants qui choisissent de s’en passer

Supprimer des ingrédients adorés ? Un pari osé 

Avec plus de 11 millions de publications incluant le hashtag #avocado sur instagram, cet ingrédient est le chouchou des réseaux sociaux. Particulièrement apprécié dans le cadre d’une alimentation végétale, il est un allié de nos toasts et de notre guacamole et s’invite même dans les desserts. Aussi photogénique que diététique, l’avocat a connu une explosion de sa consommation à travers le monde, fruit d’une tendance générale de la “nourriture saine”.

Côté boeuf, il représente ⅓ de la viande consommée hors domicile. Il se glisse dans (presque) tous les burgers et s’affiche à la carte du jour d’innombrables brasseries traditionnelles. L’agneau, quant à lui, est indissociable des fêtes de Pâques, de celles de l’Aïd et des tablées dominicales. 

Le cabillaud, les crevettes et le saumon se hissent sur les 3 marches du podium des produits de la mer les plus consommés par les Français. On ne compte plus les entrées avocat-crevettes, sushis au saumon ou cabillaud pané au menu de nos restaurants préférés. 

Pour Foodchéri par exemple, le boeuf, l’avocat et le cabillaud représentaient 20% de leur chiffre d’affaires. Pourtant, ils ont pris la décision fin 2020 de les supprimer de leur carte. 

Pourquoi refuser ces produits ? Les raisins de la colère 

Si ces ingrédients sont si appréciés, ils sont pourtant de plus en plus boudés par les acteurs de la restauration engagée. C’est le cas de Foodchéri, mais aussi de Marlette et de Naturaliste, qui s’en détournent et nous expliquent leur motivation. 

Pour Marine Riclkin de chez Foochéri, leur marque est “engagée depuis 2015”. Ils sont convaincus que “c’est possible d’allier business et éthique”. “Depuis le début, notre carte est  à 50% végétarienne. C’est de notre devoir de faire bouger les lignes”. Après une concertation avec l’ADEME, ils prennent la décision d’exclure bœuf, veau, agneau mais aussi avocat et cabillaud de leur menu. “D’un point de vue environnemental, ces ingrédients représentent les pires exemples de leur catégorie.”

Source – Foochéri.com

Ainsi, les avocats dont la production est très gourmande en eau, sont majoritairement cultivés dans des pays dans lesquels le stress hydrique est déjà important comme le Mexique ou le Pérou. Au-delà du transport et des problèmes socio-économiques, les cultures intensives d’avocats mettent en danger la biodiversité et créent des déséquilibres écologiques majeurs : sécheresse et tremblements de terre.

C’est également pour cette raison que Marlette a décidé il y a quelques mois de se passer de cet ingrédient qui n’a de vert que la couleur. L’avocado toast étant pourtant parmi leurs best-sellers, ils ont pris le parti de ne plus le proposer. 

“Chez Naturaliste, on propose une cuisine naturelle et très végétale”, explique la cheffe Marvic Medina Matos. “On aime travailler en direct producteur, au rythme des saisons.

En choisissant de ne pas avoir de viande à la carte, on fait notre part.”
En effet, l’élevage intensif est source de déforestation et de surconsommation en eau. Les émissions de gaz à effet de serre du bœuf proviennent en majorité de la fermentation entérique (les rots et les pets), mais aussi de la production et de la transformation de leur alimentation et du transport.

Côté mer, La disparition des cabillauds de notre territoire de pêche s’explique par deux raisons : d’une part la surpêche, d’autre part le réchauffement climatique qui incite les populations à migrer vers le nord à la recherche d’eaux plus froides.

Filip Claeys est un restaurateur Belge qui a ouvert son restaurant il y a dix ans à Bruges. Pour Ethic Ocean, il raconte qu’il est très attentif à l’état des ressources marines. «J’ai arrêté depuis longtemps le thon rouge. Je propose du tacaud au menu. Personne ne connait cette espèce, alors je vais en salle pour expliquer. Je ne fais plus de saumon non plus ni aucune autre espèce d’élevage. »

Tacaud plutôt que cabillaud, guacamole de brocoli, “chicken bolo” :
Quelles sont les alternatives vertueuses ? 

“On met en valeur les céréales, légumes et légumineuses plutôt que de chercher à tout prix à remplacer la viande. On travaille le millet, le petit épeautre et on a même une “bolognaise” de lentilles conçue par le chef Romain Meder. C’est mieux pour notre santé et pour le bien-être des animaux. L’idée, c’est que les gens ne se rendent pas compte que la viande n’est pas au menu”, raconte Marvic de chez Naturaliste. 

Source : Instragram @Naturaliste_Paris


Chez Foodchéri, “on utilisait déjà très peu de bœuf, on a toujours fait attention à notre score carbone.
Pour la viande, en supprimant le boeuf, on a diversifié notre gamme. On cuisine pas mal de volaille (poulet, pintade ou canard) mais on met surtout le paquet sur les protéines végétales” explique Marine. 

Source – Foochéri.com

La plupart du temps, les clients accueillent d’un bon œil ces choix, et encouragent ces entreprises à continuer dans le bon sens. “Merci Merci Merci 1000 fois merci de montrer l’exemple 🙏”, “Bravo pour l’initiative 👏👏” ou “je salue la démarche”, peut-on ainsi lire en commentaire suite à l’annonce de Marlette de supprimer l’avocat de sa carte. 

Au-delà des effets d’annonce, ces choix certes importants et impactants doivent toutefois nécessairement s’accompagner d’une démarche de réflexion globale sur l’origine et la qualité des produits qui composent les plats, pour être aussi bien dans son assiette que dans ses baskets ! 

Crédits photos : Foodchéri, Naturaliste, Marlette & Brooke Lark (header)

Laurène Petit
laurene@toutmanger.fr